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Les équipes d’Ali Amara, virologue, et Vassili Soumelis, immunologiste, à l’Institut de Recherche Saint-Louis, publient une étude caractérisant la réponse immunitaire innée dans les 24 à 48h suivant un contact avec le virus SARS-CoV-2

Covid-19 : Comprendre la réponse immunitaire précoce

 

Alors que la pandémie de Covid-19 se poursuit, les scientifiques font chaque jour des progrès notables pour mieux comprendre la transmission du coronavirus SARS-CoV-2 ainsi que la réponse immunitaire qu’il déclenche lors d’une infection. Des chercheurs de l’Inserm, de l’AP-HP et Université de Paris, en collaboration avec la Rockefeller University à New-York, apportent de nouvelles données concernant les étapes très précoces de la réponse immunitaire. Les résultats sont publiés dans le Journal of Experimental Medicine.

Comprendre la réponse immunitaire anti-SARS-CoV-2 est une étape essentielle dans l’identification des sujets à risque de maladie Covid-19 grave et dans la mise en place de stratégies thérapeutiques efficaces. Si de nombreuses études ont été réalisées chez des patients à des stades avancés de l’infection, lorsqu’ils présentent déjà des signes de gravité, les étapes très précoces de la réponse immunitaire contre le virus demeurent en grande partie inconnues.

Grâce à une collaboration étroite entre les équipes Inserm d’Ali Amara, virologue, et Vassili Soumelis, immunologiste à l’Institut de Recherche Saint-Louis (Université de Paris/Inserm/AP-HP), une étude publiée dans le Journal of Experimental Medicine a pu caractériser la réponse immunitaire innée[1] dans les 24 à 48h suivant un contact avec le virus SARS-CoV-2.

Les chercheurs ont utilisé des cellules immunitaires appelées « plasmocytoïdes pré-dendritiques » comme modèle de cellules immunitaires innées jouant un rôle essentiel dans l’immunité antivirale en produisant de grandes quantités d’interféron-alpha[2].

Ils ont reconstitué la réponse immunitaire précoce au virus en mettant en contact ces cellules modèles avec des souches primaires de SARS-CoV-2 isolées à partir de patients atteints de Covid-19.

L’analyse de cette réponse reconstituée in vitro a permis de montrer que le SARS-CoV-2 induisait une activation efficace et complète des cellules plasmocytoïdes pré-dendritiques. Celles-ci produisaient alors des quantités importantes d’interféron-alpha (première ligne de défense contre les virus) et se différenciaient en cellules dendritiques capables d’activer les lymphocytes T (qui correspondent aux cellules de l’immunité spécifique). Les chercheurs ont par ailleurs pu montrer que cette activation des cellules plasmocytoïdes pré-dendritiques était partiellement inhibée par l’hydroxychloroquine, ce qui inciterait à la prudence dans l’utilisation de cette molécule.

Dans une deuxième partie du travail, les équipes ont collaboré avec l’équipe de Jean-Laurent Casanova de l’Institut Imagine (Inserm/université de Paris/AP-HP) et de la Rockefeller University à New-York, enfin d’étudier la réponse des cellules plasmocytoïdes pré-dendritiques issus de patients présentant des déficits génétiques pour certains gènes importants de l’immunité innée. L’objectif était de préciser les mécanismes moléculaires intervenant dans la réponse de ces cellules immunitaires au SARS-CoV-2.

Ces expériences effectuées à partir de prélèvements directement obtenus des patients ont montré que la réponse des cellules plasmocytoïdes pré-dendritiques est dépendante des molécules UNC93B et IRAK-4, deux molécules importantes de l’immunité innée antivirale. L’ensemble de ce travail permet de préciser la réponse immunitaire précoce au virus SARS-CoV-2 ainsi que certains de ses déterminants moléculaires.

L’étude suggère que le système immunitaire est naturellement armé pour répondre au SARS-CoV-2 et que des défauts dans la réponse des cellules plasmocytoïdes pré-dendritiques, notamment dans la production précoce d’interféron-alpha, pourraient contribuer à l’évolution de l’infection vers une forme grave.

 

[1] L’immunité innée constitue la première barrière de défense de l’organisme. Elle est déclenchée dès que l’organisme est exposé à une bactérie ou un virus (par exemple le SARS-CoV-2). Les cellules de l’immunité innée peuvent contribuer à détruire totalement les microbes détectés ou les présenter aux mécanismes de l’immunité acquise pour faciliter leur destruction par des mécanismes spécifiques (lymphocytes T et B)

[2] Les interférons sont des cytokines (protéines) dont la production est induite suite à une infection virale, une infection bactérienne, une infection parasitaire ou à la présence de cellule tumorales. Leur fonction principale est d’interférer avec la réplication virale, mais ils ont également une action antibactérienne, antiproliférative et d’activation d’autres cellules immunitaires.